En savoir plus sur les raies de la Méditerranée et de l’Atlantique
Les raies font partie des poissons cartilagineux. Le spécialiste et illustrateur arlésien Cyril Girard nous éclaire sur leur histoire, leur anatomie et leur diversité.
Les raies font partie des poissons cartilagineux. Le spécialiste et illustrateur arlésien Cyril Girard nous éclaire sur leur histoire, leur anatomie et leur diversité.
Cyril Girard
Naturaliste, illustrateur, plongeur et auteur de nombreux livres sur la biodiversité marine et terrestre de Méditerranée.
Une raie, est-ce juste un requin plat ?
En quelque sorte, oui, mais c’est évidemment plus compliqué. Les raies ont une parenté étroite avec leurs illustres cousins. Elles font partie comme eux des chondrichtyens, un nom barbare désignant les poissons cartilagineux au squelette pas ou très peu calcifié. Avec les requins, les raies partagent l’absence d’écailles, une reproduction avec accouplement et fécondation interne, ainsi qu’une peau plus ou moins recouverte de denticules. Des caractéristiques qui les placent à part de l’immense majorité des autres poissons dits osseux.
Quel est l’intérêt d’avoir un squelette cartilagineux et non osseux ?
La légèreté d’abord. Elle offre une certaine flottaison sans nécessité de vessie natatoire, ce sac rempli de gaz que possèdent les autres poissons. Et puis, cette particularité apporte aussi souplesse et agilité. Les cartilagineux dominaient durant le Paléozoïque, anciennement appelé ère primaire, c’est-à-dire il y a 550 à 250 millions d’années. L’apparition et le développement des poissons osseux ont ensuite redistribué les cartes.
L’âge d’or de ces animaux est-il révolu ?
En effet, les cartilagineux sont minoritaires et représentent moins de 4 % de la diversité actuelle des poissons. Mais les raies sont apparues il y a 240 millions d’années environ, c’est donc un groupe relativement récent. On pourrait dire que leur âge d’or, c’est maintenant. Avec les requins modernes, elles seraient issues d’un groupe de requins primitifs éteint en même temps que les dinosaures, il y a 65 millions d’années. Un troisième groupe de poissons cartilagineux subsiste encore aujourd’hui : les holocéphales. Représentées par les chimères, ces étranges créatures vivent à de grandes profondeurs.
A part la forme, qu’est-ce qui différencie les requins d’aujourd’hui des raies ?
Morphologie et silhouette ne suffisent pas toujours ! Il y a des requins assez étalés comme l’ange de mer et des raies qui le sont très peu, comme les raies-guitares. Les véritables critères distinctifs sont d’une part les nageoires pectorales, ou ailes, soudées au corps et au crâne chez les raies mais indépendantes et articulées chez leurs cousins. D’autre part, les fentes branchiales sont situées en face ventrale chez les raies et non sur les côtés. Enfin, l’émaloïde – équivalent de l’émail chez nous – présente trois couches chez les requins alors qu’il est constitué d’une seule chez les raies.
Ce petit monde des raies est-il homogène ?
Ce serait trop simple ! Mais il y a de solides généralités. Par exemple, on ne compte aucune espèce végétarienne. Qu’elles soient filtreuses ou prédatrices, toutes consomment de petits organismes marins : crustacés et poissons notamment. Neuf espèces de raies sur dix vivent camouflées sur le sédiment au fond de l’eau. Les rares autres se sont adaptées à la nage en pleine eau. Enfin, la majorité de ces poissons est ovipare et pond des œufs. Une partie seulement est ovovivipare et met au monde des bébés formés après incubation dans la mère. Observée chez certains requins, la viviparité vraie, placentaire, n’existe pas chez les raies.
Quelles raies peut-on rencontrer dans les eaux de la Méditerranée et du littoral atlantique ?
Les quatre grands groupes appelés ordres sont représentés. Difficile de les évoquer autrement que par des noms compliqués. D’abord les rajiformes les plus diversifiées que l’on pourrait qualifier de raies communes, la raie étoilée par exemple. Ensuite, les myliobatiformes comme le diable de mer ou les raies-aigles. Les torpédiniformes comme la torpille ocellée vivent dans nos eaux également. Et enfin, les raies-guitares qui font partie des rhinopristiformes.
Comment se portent les raies de nos régions ?
Assez mal, sans surprise. Beaucoup sont pêchées volontairement ou accidentellement. Les chalutages en eau profonde font par exemple énormément de dégâts chez les raies de fond. On en parle moins, mais on doit aussi déplorer la raréfaction des zones de quiétude, de nurserie ou de croissance sur le littoral. Seulement 140 km2 de la Méditerranée sont strictement protégés et soustraits à l’activité de pêche. La moitié de ces havres se situent en Corse. C’est terrible à dire, mais que ce soit sur la frange littorale, au large ou dans des grandes profondeurs, il n’y a quasiment plus d’abris sûrs pour la faune.
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Cet article est extrait de la Revue Salamandre
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