Oreillard roux, une chauve-souris à l’ouïe exceptionnelle
Pavillons démesurés, longévité hors norme, vol stationnaire… Comment l’oreillard roux cueille-t-il ses proies en toute discrétion ?
Pavillons démesurés, longévité hors norme, vol stationnaire… Comment l’oreillard roux cueille-t-il ses proies en toute discrétion ?
23 h 30, deux chiroptérologues s’activent autour d’un filet posé sur une piste forestière. Objectif de la nuit : équiper des oreillards roux de petits émetteurs. Ces chauves-souris ont un sonar performant, mais qui porte à faible distance. Il est donc difficile de les étudier avec les classiques détecteurs d’ultrasons – ou batbox – utilisés par les spécialistes. A la lumière de la frontale, un premier mammifère volant est attrapé avec délicatesse. Ses oreilles gigantesques ne laissent aucun doute, c’est bien un oreillard. Rapportés à sa taille, il a les plus grands pavillons de toutes les chauves-souris vivant sous nos latitudes.
Grâce à eux, il capte les sons avec plus de détails que les autres espèces. Son ouïe est si précise qu’on le pense capable de distinguer un insecte volant au-dessus d’un torrent. L’oreillard peut donc se passer de l’écholocation pour chasser ! En coupant son sonar, il localise ses proies au moindre de leurs mouvements sans risque d’être repéré par les insectes qui détectent les hautes fréquences. Il peut les saisir en vol ou les glaner sur le feuillage en les rabattant avec son patagium, la membrane de peau qui s’étend des ailes à la queue. Si son menu est principalement composé de papillons de nuit, il peut aussi se nourrir de bestioles non volantes ou diurnes (> Semeur de miettes). Doté d’ailes larges et courtes, sa grande agilité aérienne et sa parfaite maîtrise du vol stationnaire lui permettent de chasser dans les milieux où la végétation est dense.
Espèce forestière, Plecotus auritus chasse dans les sous-bois en évitant les plantations monotones. Les haies et les lisières sont essentielles pour qu’il se repère dans son environnement. Solitaire à la saison froide, il squatte des sites souterrains : grottes, caves, mines, tunnels ou bunkers. Ses écoutilles sont cachées sous ses ailes durant sa courte hibernation de novembre à mars. L’été, en revanche, il est plus grégaire, s’installant en colonie de reproduction de quelques dizaines d’individus dans des combles, églises ou bâtiments abandonnés. Il occupe aussi parfois des nichoirs destinés aux oiseaux et des cavités d’arbres. A nous de jouer pour lui offrir des gîtes adaptés !
Etapes du battement d’ailes de l’oreillard roux lors d’un vol stationnaire. Un dixième de seconde sépare la première et la dernière des 25 étapes. D’après Norberg (1970)
Pas une ride
Suppression des vieux arbres, raréfaction des insectes, collisions routières... Avec les dangers qui le guettent, l’espérance de vie moyenne de l’oreillard roux est de quatre ans. Mais un individu bagué en 1960 au col du Bretolet, en Suisse, y a été recapturé trente ans plus tard. Un chiffre impressionnant pour un mammifère de cette taille ! Les naturalistes notèrent même : « La bonne condition de cet individu suggère que les oreillards pourraient vivre beaucoup plus longtemps. »
Semeur de miettes
L’oreillard laisse comme traces de son passage des morceaux d’insectes qu’il ne consomme pas, notamment des ailes de papillons. Les plus grandes et colorées sont utiles pour repérer les reposoirs où il décortique ses proies. Celles du paon de jour ou de la petite tortue (> photo) sont particulièrement reconnaissables.
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Cet article est extrait de la Revue Salamandre
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