© Benoît Perrotin

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Pourquoi la mouche?

10 diptères fantastiques

Ils vivent tout autour de chez vous. Face à face avec des diptères pittoresques qui ressemblent à tout sauf à des mouches.

Ils vivent tout autour de chez vous. Face à face avec des diptères pittoresques qui ressemblent à tout sauf à des mouches.

Géant de verre

Ouf ! Ce n'est pas un moustique monstrueux qui vient de rentrer dans la cuisine mais une inoffensive grande tipule, la plus grande mouche d'Europe. Pattes pendantes, vol hésitant, le cousin comme on l'appelle aussi a l'air plutôt maladroit. Son asticot de 5 cm vit sous l'eau. Après la métamorphose, l'insecte adulte a pour principal souci de trouver un partenaire du sexe opposé. L'accouplement se fait cul à cul dans un méli-mélo de pattes interminables.

A propos, quel est l'unique moyen de défense de ce diptère ? L'insecte abandonne sans souci une ou deux pattes au prédateur qui s'en saisit. Mais il n'en a que six qui ne repousseront pas. Cette mutilation défensive déclenche chez la femelle un réflexe de ponte immédiate. « Si je me fais croquer, autant que quelques œufs en réchappent. »

10 mouches fantastiques - La Salamandre
Grande tipule / © Benoît Perrotin

Grignoteuse à plat

Des mouches minuscules de la famille des agromyzidés pondent leurs œufs dans l'épaisseur des feuilles d'une espèce de plante très précise. La larve mineuse se développe en rongeant une galerie de plus en plus large dans ce monde en deux dimensions. L'asticot est comme un coq en pâte entouré de sa nourriture qui le protège des prédateurs. L'identité de la plante hôte, le tracé de la galerie, ses arabesques et l'allure du trou de sortie indiquent à laquelle des 850 mouches mineuses on a affaire. En revanche, en détaillant à la loupe l'asticot ou l'adulte, c'est quasiment impossible.

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Une larve mineuse et ses galeries dans une feuille verte, et la mouche correspondante au stade adulte / © Benoît Perrotin

Bébé planctonique

On les appelle vers de cristal. Les petites larves transparentes des moucherons Chaoborus nagent dans les étangs et les lacs grâce à un large éventail de soies. Complètement indépendantes de l'atmosphère, ces larves absorbent l'oxygène dissous dans l'eau à travers leur peau. Faute de pattes, elles saisissent leurs proies avec leurs deux antennes, puis les découpent grâce à des mandibules affûtées comme des rasoirs. De jour, elles se dissimulent dans la vase jusqu'à 30 ou 40 m sous l'eau. De nuit, elles remontent chasser le plancton entre deux eaux. Et quand vient l'émergence, des milliards de moucherons emplissent l'air de leurs essaims éphémères.

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Larve de moucheron Chaoborus / © Benoît Perrotin

Colibri tueur

Longue trompe, fourrure brune, pattes pendantes. Non, ce butineur qui sirote les primevères en vol stationnaire n'est pas un bourdon mais un grand bombyle, une authentique mouche. L'insecte printanier navigue de corolle en corolle comme un colibri. Un adorable butineur nectarivore ? Pas seulement ! Le bombyle a un secret que les entomologistes ont mis du temps à découvrir. La femelle dépose chacun de ses œufs à l'entrée d'une galerie d'abeille solitaire. A l'éclosion, la larve équipée de solides mandibules s'enfonce dans la demeure de son hôte dont elle dévore la descendance avant de se nymphoser. Ainsi, au printemps suivant, un bombyle fringant émergera du nid d'une abeille.

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Grand bombyle / © Benoît Perrotin

Mouche des neiges

Tous les diptères ont une paire d'ailes ? Que nenni! Les mouches adultes qui vivent en permanence dans la litière n'en ont absolument pas l'usage. L'évolution les a débarrassées de ces organes ainsi que des muscles qui les actionnent. Dans un second temps, certaines de ces mouches aptères se seraient adaptées aux climats froids. Ainsi, la mouche des neiges Chionea lutescens prospère jusqu'à 2500 m d'altitude. En plein hiver, elle se promène sur la neige et peut rester en activité jusqu'à une température avoisinant -10°C sans qu'on sache encore très bien comment elle peut bouger avec un corps aussi froid… et résister au gel !

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Mouche des neiges Chionea lutescens / © Benoît Perrotin

Pou des abeilles

Oui, on dirait un pou ! Pourtant, cet animal qui habite dans les ruches est une véritable mouche parasite des abeilles. Elle est aveugle, sans ailes et mesure 1,5 mm de long. Braula coeca vit les pattes accrochées à la toison de son hôte. Quand il a faim, il se rapproche de la bouche de sa monture qu'il chatouille avec ses appendices. L'ouvrière régurgite alors un peu de nectar, de miel ou de gelée royale qu'il aspire avec sa trompe.

Au bout d'un certain temps, l'abeille finit par comprendre que ces sollicitations ne viennent pas d'une congénère. Quand elle cesse de distribuer, le pou des abeilles doit changer de véhicule. Le Braula pond ses œufs sur des rayons de cire, puis ses larves creusent la ruche à la recherche de miel. Les traitements utilisés pour lutter contre l'acarien varroa ont fait pratiquement disparaître ce diptère beaucoup moins dommageable.

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Mouche parasite, Braula coeca / © Benoît Perrotin

Galant créatif

Voici des mâles romantiques ! Au lieu de sauter brutalement sur la première femelle venue comme c'est l'usage chez de nombreux diptères, certains courtisans de la famille des empididés séduisent leur partenaire en lui offrant une proie capturée pour l'occasion. Avantage : la femelle occupée à dévorer son cadeau se laisse faire et ne risque pas de dévorer le mâle plus petit qu'elle. Chez les mouches Hilara le cadeau se ritualise. Selon les espèces, le mâle entoure son présent dans un joli petit cocon de soie, voire même offre un emballage… vide ! Parfois, son offrande est un simple pétale de couleur éclatante. Joli, non?

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Mouche Hilara / © Benoît Perrotin

Asticot architecte

Sans doute avez-vous déjà remarqué de petites verrues ventrues et pointues sur une feuille de hêtre ? Ce sont des galles. Si vous ouvrez l'un de ces coffres-forts végétaux, vous trouverez un vermisseau bien protégé : la larve de la cécidomyie du hêtre. En automne, la galle tombe par terre avec la feuille. Début avril, elle libère un moucheron minuscule. Après l'accouplement, la femelle pond ses œufs sur des bourgeons de son arbre hôte juste avant la feuillaison. La salive des jeunes larves provoque la croissance de la galle qui les abrite et les nourrit tout à la fois. On connaît des centaines d'espèces de cécidomyies dont certaines s'attaquent à des plantes cultivées.

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Galles contenant une larve de la cécidomyie du hêtre et la mouche adulte / © Benoît Perrotin

Creuseur d'entonnoir

Peut-être connaissez-vous le fourmilion, cet insecte à l'allure de libellule dont la larve creuse un entonnoir pour piéger les fourmis. L'asticot d'une jolie mouche tout aussi élégante fait de même. Le ver-lion creuse le sable durant la nuit pour aménager un traquenard cylindrique. Quand une proie s'aventure dans l'entonnoir, le chasseur à l'affût la bombarde de sable pour la faire glisser au fond du piège et la ceinturer par le milieu du corps. Puis le ver-lion injecte sa salive venimeuse dans sa victime pour la tuer et dissoudre ses tissus. Après quoi, il n'a plus qu'à aspirer les chairs liquéfiées. Ses entonnoirs sont un peu plus petits et moins évasés que ceux du fourmilion. On les reconnaît à leur fond arrondi comme celui d'un minuscule coquetier.

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Ver-lion au milieu de son trou dans le sable et la mouche adulte / © Benoît Perrotin

Aquatique adhésif

Dans les cascades et les torrents impétueux, une fine couche d'algues tapisse les cailloux polis par le courant. Ces prairies millimétriques sont broutées par un asticot extraordinaire de la famille des blépharicérides. Cette larve plate est équipée de six ventouses sur le ventre qui sont probablement les organes de fixation les plus perfectionnés du monde animal. La succion de chacun de ces disques est provoquée par un vide d'air. Une sécrétion adhésive renforce encore le dispositif. Juste avant de s'envoler de la surface bouillonnante, le moucheron doit s'agripper un instant par les pattes arrière à l'enveloppe de la nymphe dont il vient de s'extraire tandis que ses pattes avant prennent appui sur l'eau. Une manœuvre périlleuse qui échoue souvent…

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Asticot de la famille des blépharicérides / © Benoît Perrotin

Découvrez maintenant la mouche star des laboratoires scientifiques, la drosophile.

Continuez votre lecture avec notre dossier complet sur l'abeille. Zoom sur leurs techniques de piratage, coopération et communication.

Retrouvez la totalité du dossier consacré à la mouche : Pourquoi la mouche ?

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Pourquoi la mouche?

Couverture de La Salamandre n°241

Cet article est extrait de la Revue Salamandre

n° 241  Août - Septembre 2017, article initialement paru sous le titre "Les 10 fantastiques"
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