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Pour rester viable, la population de lynx a besoin de nouveaux lâchers

La population de lynx est en légère hausse dans le Jura et les Alpes. Mais la consanguinité de la population, qui descend exclusivement de quelques individus issus des Carpates et introduits en Suisse dans les années 1970-80, menace la viabilité de l'espèce. La fondation Kora estime qu'importer de nouveaux lynx d'Europe de l'est permettrait de réduire cette consanguinité. Explication.

La population de lynx est en légère hausse dans le Jura et les Alpes. Mais la consanguinité de la population, qui descend exclusivement de quelques individus issus des Carpates et introduits en Suisse dans les années 1970-80, menace la viabilité de l'espèce. La fondation Kora estime qu'importer de nouveaux lynx d'Europe de l'est permettrait de réduire cette consanguinité. Explication.

La cohabitation des grands carnivores avec les activités humaines est semée d'embûches. Les tirs de régulation suite à des attaques sur du bétail et la fragmentation de l'habitat laissent peu de place aux ours, loups ou lynx pour prospérer. Des cas de braconnage existent également : un tir illégal récent pose ainsi question dans le Jura. Dans la nuit du 3 au 4 mars 2025, un lynx a été retrouvé mort en bordure de route dans le secteur du Mont-Sagne à La Chaux-de-Fonds (NE). L'autopsie de la dépouille a révélé qu'il avait été victime d'un tir provenant d'une arme à feu et une enquête a été ouverte.

Malgré ces vents contraires, le lynx boréal est en expansion en Europe centrale et de l'ouest où les populations se concentrent en Suisse et en France, précisément dans le Jura et les Alpes du Nord. En 2024, 343 individus ont été recensés en Suisse, épicentre des effectifs, contre seulement 250 en 2018, selon les chiffres de la fondation Kora, spécialiste de l'écologie des grands carnivores.

Pourtant, l'avenir du félin aux oreilles ornées de pinceaux est loin d'être assuré localement. Réintroduit il y a un demi-siècle dans la Confédération helvétique, d'où il a ensuite conquis les massifs français, le prédateur souffre d'un manque de diversité génétique. Alors que la population indigène avait disparu en 1894, avec un dernier individu aperçu sur le Simplon, la réintroduction d'individus prélevés dans les Carpates a été lancée au début des années 1970 avec 16 lynx lâchés dans les Alpes et 10 dans le Jura.

Les larges pattes du lynx lui permettent de se déplacer facilement dans la neige. / © David - stock.adobe.com

Touchés au coeur

"Tous les lynx qu'on a en Suisse descendent de cette même lignée qui a été réintroduit (c'est donc le même cas de figure pour les lynx vivant en France, qui sont venus de Suisse). C'est comme si on avait des poissons dans un aquarium : ils sont coupés des autres populations d'Europe, il n'y a pas d’échange. Si les lynx suisses continuent à se reproduire uniquement entre eux, ça ne marchera pas", juge Luc Le Grand, biologiste chez Kora. Selon une étude scientifique menée par l'Université de Berne, un quart des lynx peuplant la Suisse souffrent ainsi de malformations cardiaques, avec davantage de spécimens alpins touchés.

À voir : le documentaire LYNX qui raconte la vie d'une famille de lynx dans le Jura avec des images exceptionnelles

Pour un meilleur brassage génétique, il faudrait au moins que des lynx du Jura puissent rejoindre ceux des Alpes et inversement. Pour cela, Kora aimerait voir la construction de davantage d'écoponts, qui permettent aux animaux d'enjamber les autoroutes et voies ferrées. Quelques individus ont déjà fait le grand voyage à travers le Plateau suisse pour relier les deux massifs. C'est le cas de la femelle Mona, âgée de 15 ans, qui a quitté son Jura natal pour rejoindre le Plateau. L'un de ses rejetons a ensuite gagné les Alpes. Mais les échanges restent trop rares.

Il faut passer à l’action mais avec une acceptation populaire

Une solution à moyen ou long terme est donc de lâcher à nouveau des lynx venus par exemple des Carpates. C'est ce que note le groupe d'experts européens du LCIE dans son dernier rapport sur le cas du lynx sur le Vieux continent, qui appelle à une action rapide. "La plupart des populations réintroduites en Europe centrale sont très petites et potentiellement consanguines, si bien qu'il est nécessaire d'introduire davantage d'animaux des Carpates et de promouvoir une plus grande connectivité", peut-on lire.

Un transfert d'animaux n'est cependant pas un acte anodin. Kora, qui est en faveur d'une telle action, est très consciente de l'importance de convaincre la population du bien-fondé de l'arrivée de nouveaux lynx. "On aimerait ramener du sang frais pour le lynx en Suisse. Il est cependant essentiel d'impliquer dès le départ toutes les parties concernées pour garantir l'adhésion nécessaire à la réussite d'un tel projet", juge Luc Le Grand. Le biologiste veut tout de même croire qu'une majorité de ses concitoyens s'est attachée au lynx. "Il y a beaucoup de personnes qui aiment le voir en nature et il faut faire comprendre que si rien n’est fait on pourrait perdre 50 ans d’efforts. C’est difficile de projeter une date pour une disparition du lynx en cas de non-introduction de nouveaux individus, mais on pense que cela se produira doucement."

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Écologie

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