La Minute Nature : Confidences avec Vincent Munier sur son film « Le chant des forêts »
Entretien exclusif avec Vincent Munier pour la sortie de son film « le chant des forêts », en salles dès le 17 décembre. Il nous parle avec émotion de la transmission d'une passion pour la nature de père en fils, des affûts qui ont changé sa vie, et de ce qu’il souhaite révéler de la beauté du vivant à travers cette œuvre profondément sensible.
Entretien exclusif avec Vincent Munier pour la sortie de son film « le chant des forêts », en salles dès le 17 décembre. Il nous parle avec émotion de la transmission d'une passion pour la nature de père en fils, des affûts qui ont changé sa vie, et de ce qu’il souhaite révéler de la beauté du vivant à travers cette œuvre profondément sensible.
Dans ce nouveau film, Vincent Munier propose un véritable voyage, accompagné de son père et de son fils.
" C'est une invitation à venir dans notre intimité, à être à côté de nous, sous le sapin, et écouter, tenter d'observer. Il y a un mélange d'histoire familiale, évidemment, et une histoire de transmission. Ce qui m'affecte le plus, c'est le cruel manque de sensibilité dans notre monde, de poésie aussi. Et là, j'essaie de le partager avec vous en vous amenant à l'affût.
Par le passé, je n'étais pas trop fan de montrer ma famille dans mes films, mais là, j'ai senti que c'était le moment. Mon père est en train tout doucement de s'éteindre, il approche les 80 ans. Il m'a tellement donné. Je me dis que j'ai eu une chance phénoménale de grandir avec des parents comme ça. Il ne faut pas oublier ma mère qui était vraiment un pilier de la famille.
Mon père était un fou passionné de nature, écologiste (le mot n'existait presque pas à son époque) mais un amoureux du grand dehors, et ce n'est pas donné à tout le monde. À 12 ans, ma vie a basculé grâce à lui. En me mettant à l'affût dans la forêt près de chez moi, j'ai vu un chevreuil, tout près. C'était un moment tellement puissant pour l'enfant que j'étais, que mon chemin de vie a basculé", témoigne Vincent Munier.
“Ma première rencontre avec un chevreuil a fait basculer mon chemin de vie.
„
Je n'étais effectivement plus le même. Il se passe dans nos vies des moments qui sont d'une importance capitale. Ça peut être des rencontres comme celle-ci, ça peut être des livres, des films, des grands maîtres. Je souhaitais partager cette histoire personnelle au plus grand nombre, et surtout aux enfants.
Un film profondément ancré dans sa région natale
Ce film est comme un passage de relais, et finalement, il est beaucoup plus d'importance pour moi que « La panthère des neiges ». La panthère, c'est une parenthèse enchantée, quand je suis en manque de grands espaces, d'espèces un peu emblématiques.
Mes racines sont toutefois dans les Vosges, dans les montagnes, près de chez moi. C'est là où j'ai appris à habiter ce monde avec tous les êtres vivants que l'on trouve. Je pense que c'est un film qui m'est beaucoup plus intime et plus fort.
Se raconter des histoires de génération en génération.
On a cette cabane au milieu de la forêt qui charpente un peu le film. De là, on est tous les trois, avec mon père et mon fils. On discute, on se raconte des histoires, comme à l'époque des contes. Des moments de partage devenus rares et précieux.
Mon père raconte notre histoire commune, nos moments forts pendant des affûts, et on essaie de les retransmettre dans le film. Le cerf, en l'occurrence, a été filmé maintes et maintes fois. Mais pour partager cette rencontre, je voulais presque qu'on ne le voit pas. De représenter juste ce côté très puissant, le son, ses mouvements, ses odeurs (qui manquent hélas à l'écran). Dans la nature, on ne voit que très peu les animaux, mais c'est la réalité.
“Le monde sauvage est un monde invisible mais qui laisse des traces.
„
Le grand tétras, 4ᵉ personnage du film de Vincent Munier
Le grand tétras est un oiseau qui disparaît. J'aime beaucoup ce parallèle avec mon père aussi, qui est en train de plus ou moins disparaître. Ce film, c'est presque comme si je me préparais à sa disparition, mais qui est joyeuse finalement. Parce qu'on voit bien que la mort ramène la vie. La présence du grand tétras est quand même toujours dans nos forêts. Il nous a appris à lire la forêt.
Le son au cœur du récit
J'ai été très chanceux d'avoir eu cette famille, d'avoir eu de bonnes lectures. Je me suis nourri de plein de petites choses, dans la littérature, mais pas que... dans le dessin, dans la musique et puis dans le grand dehors, évidemment. Dans le film, c'est un mélange de toutes ces influences. Il y a un peu de musique, il y a des voix de Rosemary Standley et du violoncelle de Dom la Nena. Et il y a la dimension sonore de la nature que j'ai essayé de rendre très puissante.
L'ouïe est primordiale. Je pourrais raconter tant d'histoires à partir d'un bruissement, sans même avoir vu la bête. Les affûts au grand tétras, par exemple, nous plongent sous le sapin à 17h jusqu'au lendemain 11h. Ce sont des affûts très longs, dans le noir, avec une toute petite fenêtre. On entend plus qu'on ne voit. C'est tellement plus puissant ! On est dans son duvet et le grand tétras arrive sur la branche le soir et fait ses premiers cris territoriaux. Puis le matin, on l'entend au sol....Cela laisse place à l'imaginaire.
Entre expérience personnelle et émotions sur le terrain : un défi fort en émotion pour ce nouveau film de Vincent Munier.
Le défi de ce film était de retranscrire cette expérience personnelle et ces émotions sur le terrain. C'était très difficile. Il fallait donc se replonger dans les images, " malaxer " tout ça, les sélectionner. Il y a eu un gros travail avec mes amis Laurent Joffrion et Vincent Schmitt, les monteurs. C'est un film qui s'est beaucoup construit au montage, qui a durée plus de 8 mois...
Quand je vois l'accueil du public, j'ai la sensation que ça embarque les gens, même s'il y a des plans qui sont très longs. J'avais envie de montrer que tout n'est pas gratuit dans la nature. C'est l'inverse de notre société. Quand tu as les moyens, tu peux tout avoir. Dans la nature, ce n'est pas le cas. L'affût, c'est plein d'imprévisibles, c'est un infini où tu vas de surprise en surprise. Et les surprises sont d'autant plus fortes quand elles tardent à arriver.
Un film avec un rythme lent : c'est osé !
C'est osé, mais c'est une sorte de poésie. J'aime beaucoup les films coréens ou japonais qui sont très contemplatifs. Il faut prendre le temps, évidemment, et c'est une espèce d'immersion. On y rentre ou on n'y rentre pas... Mais, je suis un peu déboussolé quand même par ce nouveau monde avec les réseaux, Instagram... on regarde les vidéos en fois deux maintenant, les vocaux aussi. Il y a une perte de la saveur des choses. Ce film est une proposition de prendre le chemin inverse.
Tu en penses quoi de la Salamandre ?
C'est tellement précieux de vulgariser tout cette nature riche pour les enfants et les plus grands. On le voit, ce que tu as insufflé en Suisse et maintenant en France, ça porte ses fruits et vous n'êtes pas nombreux. Heureusement que vous êtes là. Bravo pour ce travail. On est tellement complémentaires, c'est important.
Trois revues pour découvrir la nature à tous les âges ! Rejoignez nos 70 000 abonnés et abonnez-vous !
Regardez dès maintenant le film " Ours, simplement sauvage " de Vincent Munier sur salamandre.tv
Retrouvez tous les épisodes de La Minute Nature sur salamandre.org ou en vous abonnant à la chaîne YouTube de Julien Perrot
Catégorie
Ces produits pourraient vous intéresser
Poursuivez votre découverte
La Salamandre, c’est des revues pour toute la famille
Plongez au coeur d'une nature insolite près de chez vous
Donnez envie aux enfants d'explorer et de protéger la nature
Faites découvrir aux petits la nature de manière ludique
merci de ne pas les utiliser sans l'accord de l'auteur


